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Jonathan Bablon - Le poil à gratter... N° 124 -- Janvier 2023

Dans tous les cas, il ne s’agit pas de réification de l’humain ou du vivant ni d’humanisation du végétal ou du minéral, mais d’une fusion, d’un métissage entre les règnes, pour constituer des êtres au statut indéfinissable. Cette rencontre, sur la même planche dessinée, d’objets apparemment disparates nous évoque celle « fortuite sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie » de Lautréamont[3]. Il incombe à l’observateur d’établir les relations entre ces disparates. D’aucuns caractérisent l’intelligence par la capacité d’établir des rapports entre des choses qui n’en ont pas. Si tel est le cas, les œuvres de Jonathan Bablon nous stimulent et nous rendent intelligents. Peut-être plus encore, c’est au cabinet de curiosités du XVIIIe siècle – au Wunderkammer, littéralement chambre des merveilles – que ses travaux nous renvoient. Barbara Stafford écrivait à son sujet : « La métaphore du voyage en un splendide pays étranger est juste, car l’organisation cloisonnée rend étrange même le familier. Et malgré les évidentes séparations, le visiteur sent que, par-delà leur extravagant disparate, ces objets doivent être en quelque manière liés. Évoquant une vaste et énigmatique base de données, la vue de tant de merveilles conflictuelles incite à entrer dans l’élégant labyrinthe pour y naviguer[4]. » C’est donc à un labyrinthique voyage que tous ces dessins nous invitent. Une invitation qui fait écho à celle de Baudelaire : Là, tout n’est qu’ordre et beauté, / Luxe, calme et volupté[5].

Dans d’autres séries de dessins, Jonathan Bablon s’interroge sur le futur de notre alimentation. Dans celle intitulée Il y aura toujours des tomates, 2020, il pose la question de la surexploitation des terres cultivables et propose des solutions visionnaires, bien qu’improbables, pour y remédier. Il écrit : « En asservissant une partie de la nature afin de subvenir à ces besoins, les avancées technologiques de l’homme ont accru sa capacité de production tout en détruisant les milieux propices à la culture vivrière. Si bien, qu’il faut souvent recréer artificiellement les conditions optimales, en enrichissant les sols, utiliser des satellites pour la pêche, etc… Ces dessins sont des visions mêlant le lien fort qu’a développé l’homme à la technologie et des paysages composés d’éléments biologiques[6]. » Dans le même esprit, Le fond de l’air est encore chaud – Monument Valley, 2022, part de l’image d’un des paysages touristiques les plus visités de notre planète et lui superpose des éléments industriels qui contribuent à son altération irréversible. La question est ici posée des principes fondateurs de nos sociétés, de leurs finalités et de leurs incohérences.

Le rôle de la viande dans notre chaîne alimentaire est aussi mis en cause par Jonathan Bablon. Dans la série Viande exotique, 2021, il essaie de donner, non sans un humour qui masque probablement une bonne dose de désespoir, une vision des travaux en cours pour suppléer au manque de viande animale par des protéines créées in vitro. Viande exotique – L’île à viande, 2021, transforme une des versions de L’île des morts de Böcklin en usine à produire de la viande synthétique. Viande exotique – Grotto-pinto, 2021, en fait de même dans le contexte des peintures pariétales d’une grotte préhistorique…

En 2019, parallèlement à son activité de dessinateur, notre artiste s’est lancé dans la production d’une série de petites pièces en plâtre polyester ou en porcelaine. Une des premières, Turbo stalker, 2019, se présente comme un ensemble de tubulures formant un hexagone qui évoque la structure géométrique du cœur d’un réacteur nucléaire. Nous sommes, ici, toujours dans le même registre de réflexion sur les besoins en électricité pour l’économie humaine et sur les conséquences de sa production.

À partir de 2020, dans la série Récifs affranchis, Jonathan Bablon s’intéresse au processus de blanchiment des récifs coralliens, conséquence de l’acidification accrue de l’eau de mer et du réchauffement climatique. Le lot de l’anthropocène avec ses dégradations irréparables, même si l’artiste propose des solutions utopistes pour y remédier. Ces pièces, avec leur couleur de guimauve, sont particulièrement séduisantes. Trop pour ne pas s’en méfier… Elles auraient pu être réalisées en utilisant la technologie de l’impression en 3D. De fait, même pour celles en plâtre polyester, la technique est celle de la céramique, façonnant et juxtaposant des colombins de matière. Si ce n’est que, avec le plâtre, l’exécution doit être rapide car le matériau sèche vite et est colorée d’emblée, sans recours ultérieur à des émaux.








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